François 1er a fait de l’ogdoade et du huit son chiffre royal et le code de ses entreprises, voyons pour quoi et comment mais ceci n’est qu’un liminaire à poursuivre dans le livre « Le nœud mystique ».
Le trescheur est une figure artificielle curieuse du blason composée d’une orle fleurdelysée, quelquefois double, et contrefleurdelysée : les fleurs de lys au nombre de huit (ou de seize) sont alternativement tournées vers le cœur de l’écu ou vers sa bordure. L’enceinte du trescheur signifie l’enceinte sacrée du sanctuaire intérieur à laquelle ne peut avoir accès que l’âme juste, car il faut « passer par la fleur de lys » pour y pénétrer.
Les huit fleurs de lys symbolisent le monde de l’ogdoade intermédiaire entre le carré terrestre et le cercle céleste, qui délimite extérieurement le « séjour des bienheureux ».
Le nombre huit rappelle en effet l’état de l’Homme Nouveau, état de Grâce où s’accomplissent les huit béatitudes évangéliques donnant accès au Paradis. Le fait que les fleurs de lys en ornent les « portes » visibles renforce ce qui a été dit de cette fleur, comme symbole de la pureté et de la virginité primordiale, et du jardin d’Eden.
Le trescheur évoque alors le triple cœur ou centre intérieur du corps glorieux, de l’âme illuminée et pure et de l’Esprit.
On retrouve encore les fleurs de lys associées au nombre de huit dans la figure du rais d’escarboucle où elles terminent huit bâtons pommetés réunis en cœur. Ces huit sceptres réunis par leur base évoquent la maîtrise de l’âme et du monde intermédiaire.
Les rais, ou rayons fleurdelysés, symbolisent alors l’action illuminatrice de la Grâce partant du centre de l’abîme et traversant les enceintes pommetées du « jardin des Hespérides » (où croissent les pommes d’or) pour se répandre dans toutes les directions de l’espace. C’est un des plus clairs symboles de l’action vivifiante et réintégratrice de l’Esprit Saint sur les âmes. D’autant que l’escarboucle centrale a constamment, au Moyen Age, la signification d’une pierre magique, dont la couleur de sang » la rapproche de la Pierre Philosophale. Elle était réputée guérir de nombreuses maladies, et on la portait sur le front ou sur le nasal du heaume, ce qui évoque le troisième œil de l’initiation. Le rais d’escarboucle symbolise donc le rayonnement du héros inspiré par l’Esprit, et maîtrisant la concentration des énergies vitales. D’un autre point de vue, le rais d’escarboucle évoque les huit rayons de la roue du monde actionnés par le moteur immobile qui siège précisément « sur l’abîme » et « dans le cœur ».
Là encore, les fleurs de lys sont les points de passage pour regagner le centre, comme elles sont aussi l’expression trinitaire visible de ce centre figuré à Chambord par l’escalier à double révolution.
L’archange Gabriel, chargé de l’Annonciation et de la Révélation illuminatrice, est traditionnellement figuré tenant des lys dans sa main. Le rais d’escarboucle annonce ainsi une plénitude spirituelle illuminatrice et bienfaisante.
Chambord et la Cabale
Deux grands cabalistes en plus de Léonard e Vinci sont à l’arrière plan de la conception architecturale de Chambord : Jean Thénaud et François des Moulins de Rochefort en tant que grand aumônier de François Ier.
Le système de Jean Thenaud a l’apparence d’un véritable édifice, qualifié comme une cité de gloire perpétuelle et impérissable (la Jérusalem divine). C’est un bâtiment à trois niveaux, avec une porte d’entrée et un chemin, à la fois ascendant ou descendant, entre la terre et le ciel, entre l’Enfer et le Paradis. Dans ce bâtiment on rencontre des personnages qui vont en haut ou qui descendent.
D’après Thenaud, le roi doit effectuer les rites religieux dans un Palais magnifique à l’écart du monde. La naissance du Château de Chambord, avec le chantier qui débute en septembre 1519 pour les vingt-cinq ans du roi, coïncide avec la livraison du Traité de cabale de Thenaud et aussi avec la nomination de François des Moulins de Rochefort en tant que grand aumônier de François Ier.
Thenaud encourage François Ier à édifier des bâtiments pour conserver sa mémoire.
Du charbon au diamant, histoire hermétique d’un symbole
Le carbone, ce corps simple, est si fondamental à la vie que l’étude de ses divers composés a pris le titre de chimie organique ; ces mêmes composés, ayant rempli leur rôle chez les vivants, deviennent, à l’état fossile, les hydrocarbures d’où nous vient l’essentiel de l’énergie industrielle. On peut déchiffrer là comme une parabole concrète de la finalité des choses animées : toute vie est vouée à se résorber dans le feu.
Mais le carbone a la particularité de présenter deux variétés cristallisées assez pures : le graphite et le diamant. Ce sont les deux visages complémentaires que les chimistes sont accoutumés de trouver à leur Mercure, et les théologiens au Christ Jésus : le Médiateur tient ainsi d’une part au Plomb, d’autre part à l’Or.
Le graphite, ou plombalgine, cristallisé en rhombohèdres par lamelles hexagonales, porte le sceau du SIX – le carbone est d’ailleurs le sixième élément chimique répertorié dans la classification périodique de Mendeleïev et représente donc l’aspect terrestre, le vêtement du Magistère « la neige noire », en quelque sorte. Il est vrai que, comme le plomb des imprimeurs, le graphite ou fusain est la matière première de l’écriture, voire de tout graphisme à partir du plus élémentaire, son œuvre au noir.
Le diamant est on ne peut plus son contraire : le plus transparent, le plus dense et le plus dur des minéraux, il illustre, par la structure de ses cristaux, la représentation atomique que l’on s’en fait. Un tétraèdre régulier dont il est le centre, chacun des sommets correspondant à l’une de ses valences. Il est, en effet, marqué du sceau du quaternaire et de ses redoublements. Charbon étincelant avant même la combustion qui, le cas échéant, le libère tout entier, sans une scorie, il arde dans les huit directions de l’espace autant de feux.
Le règne minéral est ici porté à son apogée et parle le langage de l’esprit. La formation du mot diamant à elle seule en témoigne.
« Cette pureté isotropique de la pierre, ou mieux encore du diamant, s’apparente à l’infinité de sens du symbolisme, et le symbole est en quelque sorte analogue au cristal qui le typifie.» Jean Tourniac
Adamas, adamantos désigne en grec ce que l’être a d’irréductible, de quintessentiel – l’élixir des Arabes – ce par quoi sa dureté échappe à l’érosion du temps et du mouvement, son « atomie », sa part éternelle. La transparence est introduite par le dia de diaphanés, ce rayon de lumière du I pointé — et voici l’absolue densité adamantine transpercée par la flèche solaire et prête à se résoudre en clarté. A la plus extrême coagulation cristalline répond la maximale dissolution.
Par une rencontre linguistique inexplicable, Adamah, en hébreu, est la terre, et Adam, pétri de cette terre, coagulé, est le nom du premier Homme.
Di-Adam (Diadème) est le nom de l’Homme nouveau, rayonnant de grâce dans la transfixion dont il est victime, et pour cela couronné du diadème.
S’il fallait une preuve que l’Israël mystique a reconnu, dans le serviteur souffrant sous les toile, le Roi de gloire attendu, que l’on veuille bien la trouver en ceci : que le Christ fut couronné d’épines, comme fut pris au piège des épines le bélier substitué à Isaac, comme d’un buisson d’épines en feu se révèle à Moïse YHWH ; or, épine se dit en hébreu schamir, et schamir désigne aussi le diamant.
« Platon décrit précisément l’Axe du monde comme un axe lumineux de diamant ; cet axe est entouré de plusieurs gaines concentriques, de dimensions et de couleurs diverses, correspondant aux différentes sphères planétaires, et se mouvant autour de lui. D’autre part, le symbolisme bouddhique du « trône de diamant », situé au pied de l’Arbre de la Sagesse » et au centre-même de la « Roue du Monde », c’est-à-dire au point unique qui demeure toujours immobile, n’est pas moins significatif sous le même rapport. »
Le diamant, feu solide, est la forme héraldique de la vertu divine quand, répandue dans la Nature sous l’aspect intact de sa naissance édénique, elle la rapporte à l’être, la Lui rend.
Discernons bien ce double mouvement de systole et diastole, d’entropie et de négantropie, dont une autre image va nous apparaître, encore une fois cristalline.
Car de la même racine, qui plonge sans doute au fond de la mémoire du monde, est issu le substantif aimant. Il faudrait d’autres arguments qu’étymologiques pour expliquer cela : l’homonymie avec le verbe aimer, et avec animer : n’est-ce pas le rythme du souffle, l’âme, qui correspond à la pulsation cosmique ? En vérité, ici, la langue blasonne. L’être aimant, métal d’amour dont l’attraction régit la ronde cosmique et polarise toute la matière créée, est, encore une fois et à jamais, le Christ en gloire. Lui même l’a prophétisé, de son vivant d’homme, révélant du même coup de quelle mort il mourrait :
«Et pour moi, quand j’aurai été élevé de la terre, j’attirerai tout à moi.»
Les cristaux de l’aimant naturel, ou magnétite, sont des octaèdres réguliers ce qui nous amène à jeter un autre regard sur l’omniprésence du huit à Chambord.
Fil d’Ariane et lacs d’amour
Lorsque Fulcanelli glose sur le nom d’Ariane pour établir une liaison entre araignée-aimant-fer-soleil levant, nous sommes tentés d’emprunter le même sillon à travers le labyrinthe crétois : Ariane, par son fil guidant Thésée, lui a sans doute fourni, par l’amour, l’aimant et les repères polaires utiles à sa navigation libératrice. Cela se passait, souvenons-nous, en ce temps charnière où la théophanie du Taureau s’achevait dans les outrances d’un culte sanguinaire. Mais Thésée, hélas, en s’embarquant pour l’ère nouvelle, laissa Ariane sur le bord, et le legs précieux, non seulement de la boussole, mais de tout ce que comportait la sagesse arachnéenne, passa par le sommeil de la mort dyonisiaque jusqu’à ce que le dieu, en Christ ressuscité, nous le rende.
Cette araignée fileuse, à qui nous devons le nom des astres et celui d’un genre de héron, posté là pour jalonner la quête, est …
à suivre dans l’ouvrage à paraitre
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De l’humble et grossière corde à nœuds des franciscains chargés de garder les lieux saints en Palestine, en passant par d’illustres ordres de chevalerie fondés par Anne de Bretagne et Louise de Savoie jusqu’au Roi chevalier, François 1er lui-même, qui fit de la cordelière son chiffre royal, quel parcours que celui de cette cordelière appelée à figurer sur les blasons et autres armoiries royales. L’auteur retrace cette histoire qui s’étend sur plusieurs siècles, l’occasion de redécouvrir ces ordres de chevalerie prestigieux qui partirent sur la trace des templiers et leur succédèrent ainsi que ces ordres religieux des frères mineurs à la vocation œcuménique et porteur d’universalisme. Tous utilisèrent cette cordelière comme motif de leur engagement séculier. Au final, cette corde fut appelé de façon assez curieuse « lacs d’amour », lacs étant la transposition du vieux mot « lacé » tandis qu’amour fut entendu comme dévotion à une cause supérieure. Beau symbole qui fut intégré par la nouvelle franc-maçonnerie française du XVIIIème siècle comme décor du tableau de loge. Ceux-ci dans la tradition des bâtisseurs de cathédrales y trouvèrent un sens nouveau liant la corde à la concorde (en fait une erreur de traduction) Celle-ci, nul ne la regrettera par la profondeur et la polyphonie de son symbolisme quelle apporta à cette fraternité des bâtisseurs rassemblés au sein de corporations franches, les freemasons. Au travers de ce livre, nous entrevoyons aussi de nouveaux sens possible qui pourraient en prolonger l’étude et réactualiser ainsi la portée de son symbolisme. L’étude se termine par une réflexion sur le concept de nœud mystique, lemniscate ouvrant sur les portes de l’infini dont il est également le symbole. Puis nous y retrouverons celui de joie séraphique, sans laquelle il n’y a pas de chaine d’union possible, concepts que l’on doit à celui qui le premier en fit la renommée au travers du monde, à savoir St François d’Assise le bienheureux. Réflexion également prolongée par Dante dans sa Divine Comédie. Ceux qui le liront pourront aussi ainsi méditer en toute clarté l’invocation qui clôt les travaux de loge « que la joie soit dans nos cœurs.
L’auteur a occupé de nombreuses fonctions au sein d’une grande obédience française, (GLdF) participé à différentes revues maçonniques et nous livre après 25 ans de recherche ses réflexions sur des aspects du symbolisme ayant suscités bien des questions et bien des malentendus.