Les sept vies du Comte de St Germain connu aussi sous d’autres noms tels que « le Marquis de Montferrat », « Aymar ou Marquis de Betmar », « Chevalier Schoening », « Count Weldon », « Comte Soltikoff », « Graf Tzarogy et Prinz Ragoczy ».
Sa date de naissance présumée est le 28 mai 1696 tandis que son décès (confirmé) est enregistré au 27 février 1784 à Eckernförde en Allemagne. On suppose (très fortement) qu’il est le fils de Francis II Ragoczy (François II Rákóczi de Felsővadász ) et de Charlotte Amalie Rákócz, nobles hongrois.
Les ascendances
Le père : Francis II Ragoczy reçoit de la Diète le titre de prince de Transylvanie le 8 juillet 1704 sous le nom de François II Rákóczi.
Il essaye d’organiser un État kurutz qui ne prélève pas d’impôts sur les paysans et vit des revenus des domaines confisqués aux Impériaux ; il met sur pied une industrie de guerre en créant de nombreuses manufactures et pratique une politique animée par la mise en place d’un Conseil économique.
Il est proclamé régent de Hongrie en septembre 1705 et recherche l’alliance française en faisant déclarer les Habsbourg déchus de leur droits sur le royaume de Hongrie à l’assemblée d’Ónod le 5 avril 1707. Les mesures sociales qu’il envisageait de prendre, notamment l’émancipation des paysans, inquiètent la noblesse tandis que l’Église se méfie de son entourage protestant.
Battu à Trencsén en 1708, il ne peut empêcher Sándor Károlyi de négocier une paix séparée avec les impériaux en 1711. Il perd son titre de prince de Transylvanie en février 1711. À la paix de Szatmár le 30 avril 1711, les insurgés dont François II Rákóczi lui-même sont amnistiés s’ils prêtent serment au nouvel empereur Charles VI de Habsbourg.
François Rákóczi refuse de souscrire à ce traité et recherche en vain l’alliance du tsar Pierre Ier le Grand. Il plaide encore pour l’indépendance de la Hongrie en 1713 lors des négociations des traités d’Utrecht. Puis passe le reste de sa vie en exil en Prusse, en France et en Turquie. Il meurt à Tekirdağ, en Turquie, le 8 avril 1735. Il fut inhumé dans la chapelle de l’ambassade de France située aujourd’hui au sein du lycée Saint-Benoît à Istanbul, à côté de sa mère Ilona Zrínyi. En 1906, leurs corps furent envoyés en Hongrie et ré-enterrés dans la Cathédrale Sainte-Élisabeth de Kassa le 29 octobre. C’est donc à l’occasion de cet exil que le jeune et futur Comte de St Germain naitra et se formera.
La mère : Charlotte-Amélie de Hesse-Wanfried (née le à Wanfried et morte le à Paris) était la fille aînée du second mariage du landgrave Charles de Hesse-Wanfried avec Alexandrine Julie, fille du comte Enrico de Leiningen-Dabo et veuve du comte Georges III de Hesse-Itter.
Charlotte Amélie a été mariée à 16 ans, le 25 septembre 1694, à Cologne avec le prince François II Rákóczi ( 27 mars 1676, 8 avril 1735) de la Transylvanie, le futur leader révolutionnaire hongrois. Elle a vécu avec lui le plus souvent à Varsovie et à Saint-Pétersbourg.
Officiellement elle a eu deux enfants et le troisième, le futur Comte de St Germain vit le jour à St Pétersbourg où il cherchera sa trace plus tard et c’est auprès de sa famille qu’il trouvera son dernier refuge à Louisenlund dans le château familial du comte de Hesse.
Selon une autre hypothèse non vérifiée, le comte de Saint Germain serait l’enfant illégitime issu d’une liaison entre le Prince François II Rákóczi de Transylvanie et de la princesse Violante-Béatrice de Bavière. Ceci expliquerait ses séjours en Bavière tandis que par le biais de l’épouse de son père il aurait eu accès au Gotha des Habsbourg et à la famille des Hesse. Sur cette hypothèse il fut élevé à Florence par Gian’ de Medici, son beau-frère.
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Violante-Béatrice de Bavière était une femme remarquablement douée et était fort intéressée pour les arts, écrivait des pièces de théâtre, jouait du clavecin et d ela flûte , parlait et écrivait parfaitement six langues. Aurait-elle complété son éducation musicale ? On comprend dès lors pourquoi certains virent en lui le descendant caché de quelque personnalité royale, et dans cette filiation supposée la raison de son intimité avec le roi Louis XV. Ainsi a-t-on pu également reconnaître en lui l’enfant naturel de la reine d’Espagne Marie-Anne de Neubourg, et d’un noble, le comte de Melgar mais cette dernière piste n’est pas confirmée par ses différents lieux de villégiature.
Ce prestigieux pédigrée explique sa royale éducation, sa fortune et son cosmopolitisme.
Qui est le comte de St Germain ? témoignages, preuves et ragots
Le comte de Saint-Germain, personnage légendaire s’il en fut, est certainement l’une des figures les plus fascinantes du siècle des Lumières. Maître de l’occulte, il aurait possédé la recette de l’Élixir de longue vie et détenu le secret de l’immortalité. Il aurait ainsi vécu plusieurs siècles, parcouru le vaste monde, côtoyé les plus grands monarques de tous les temps déchirant les voiles du temps et de l’espace …
Les sources à la lumière de l’Histoire
Les rares sources historiques dont nous disposons sont fortement imprégnées de la légende, emplie de prodiges et de croyances surnaturelles caractéristiques de la haute-société française du XVIIIe siècle. Une légende d’ailleurs entretenue au fil des siècles par les membres de sociétés secrètes qui se revendiquent héritiers du comte de Saint-Germain.
D’autres St Germain : de plus, l’homme est parfois confondu, par certains biographes, avec quelques-uns de ses homonymes célèbres tels que Claude-Louis, comte de Saint-Germain (1707-1778), ministre de la guerre sous Louis XVI, Pierre-Mathieu Renault de Saint-Germain (1697-1777), directeur de la compagnie des Indes et gouverneur du Bengale en 1755, ou encore Robert-François Quesnay de Saint-Germain (1751-1805) qui était le petit-fils de François Quesnay, médecin de la marquise de Pompadour, et qui semble avoir été un occultiste notoire fréquentant assidûment les milieux franc-maçons. On sait que Robert-François Quesnay de Saint-Germain prononça l’éloge funèbre de Court de Gébelin en 1784) et il aurait également participé aux fameux soupers des Illuminés organisés au château d’Ermenonville avant la Révolution avec son ami Pierre Samuel Du Pont de Nemours. Ces homonymes ont donc ajouté à la confusion.
Après avoir écarté les homonymes du comte, il a fallu aussi mettre de côté les sources peu dignes de créance parmi les récits de contemporains affirmant avoir côtoyé ce fameux comte de Saint-Germain. Parmi les plus cités par les biographes, on compte : Les Souvenirs de Pauline de Chavigny, comtesse d’Adhémar et les Mémoires de Madame Du Hausset, femme de chambre de Mme de Pompadour, qui s’avèrent tous deux être des faux tardifs, le premier attribué au baron de Lamothe-Langon, et le second à Sénac de Meilhan. De même, pour les Mémoires de Casanova, où le comte de Saint-Germain est qualifié de « charlatan » et qui sont parsemés de détails fantaisistes ajoutés par son éditeur, Jules Laforgue, qui ne seront corrigés qu’en 1960 lors de la publication du manuscrit autographe. Cela laissa largement le temps aux biographes des XIXe et XXe siècles de puiser dans ces extravagances. Enfin, le célèbre Sicilien Cagliostro (Giuseppe Balsamo), un autre personnage haut en couleur vivant d’escroqueries et qui se présentera plus tard comme le disciple du comte de Saint-Germain, a lui aussi raconté bon nombre d’anecdotes sur les pouvoirs alchimiques du comte. Ces récits ne sont pas directement exploitables au regard de leur contenu, truffé d’exagérations … La question reste donc à ce stade entière : de qui St Germain est-il le nom ?
Quelles sont donc les témoignages que nous puissions qualifier d’irréfutable ?
La première source mentionnant l’existence du comte de Saint-Germain remonte aux années 1740, en Angleterre. On apprend en effet, au travers des écrits de Horace Walpole, comte d’Oxford (Yales Editions, vol. 26, p. 20), qu’un mystérieux personnage apatride et se faisant appeler comte de Saint-Germain, s’est installé à Londres en 1743. Il est alors reconnu et célébré pour ses talents de musicien et de compositeur. Horace Walpole indique qu’il chante d’une voix fluette, joue du violon à merveille et compose de nombreux airs d’opéra. Lors de son séjour dans la capitale britannique, ce comte virtuose aurait été en étroite relation avec le prince Ferdinand Philipp Joseph Lobkowitz (également compositeur et violoniste) à qui il aurait dédié L’incostanza delusa, un très bel opéra qui fut donné au Haymarket Theatre de Londres en 1745 et dont il avait composé la plupart des morceaux. Entre 1745 et 1765, l’éditeur John Walsh junior publie, à Londres, plusieurs morceaux pour violon composés par le comte de Saint-Germain.
Saint-Germain est également auteur d’une Musique raisonnée, selon le bon sens, aux dames Angloises qui aiment le vrai goût en cet art, également dédiée au prince Lobkowitz.
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Franz Joseph Maximilian, 7e prince de Lobkowitz (né le à Roudnice nad Labem (en allemand : Raudnitz an der Elbe), aujourd’hui en République tchèque et décédé le à Třeboň (en allemand : Wittingau), id.), 1er duc de Raudnitz (1786), est un prince de Bohême. Generalmajor autrichien, grand mélomane et bon violoniste, il fut un important mécène de Josef Haydn et de Ludwig van Beethoven, qui lui dédia de nombreux chefs-d’œuvre.
Bien que les compositions musicales du comte remportent à l’époque un certain succès, personne ne connaît alors sa véritable identité et de drôles de rumeurs circulent sur son compte. Dans une correspondance de Horace Walpole adressée à Sir Horace Mann, le comte d’Oxford nous apprend que ce compositeur et violoniste de génie – que d’aucuns pensent d’origine italienne, espagnole ou encore polonaise – aurait épousé une femme très fortunée et se serait ensuite enfui avec ses bijoux à Constantinople. Derrière cette folle rumeur on aura tout de même noté qu’Istanbul (Constantinople) fut l’une des villes d’exil de son père). Est-ce une rumeur qui court pour expliquer l’opulence dans laquelle vivait le comte ? Même le prince de Galles, intrigué par cet énigmatique personnage, aurait tenté d’en savoir plus, sans succès. Mais on apprend, dans cette même lettre, que l’escapade londonienne de Saint-Germain tourne court.
Le séjour londonien
En ces temps, le trouble régnait à Londres. Il résultait des affrontements entre les partisans du roi en titre Georges II (les hanovriens) et les partisans de l’écossais déchu Jacques III (dynastie des Stuarts et prétendant au trône). De son côté la France œuvrait ouvertement au rétablissement sur le trône de Jacques Stuart et une alliance armée avait déjà vu le jour en 1744 avec une expédition sur Londres dirigée depuis l’Écosse. En 1745 le fils du prétendant, Charles-Edouard fut promu régent d’Angleterre à Édimbourg. Du côté anglais on s’inquiète et l’on procède alors à des arrestations parmi les personnalités ayant un lien avec la France. Celui qui était connu « sous le nom de Comte de St Germain » fut donc assez naturellement soupçonné de collusion avec l’ennemi d’autant plus qu’il était porteur d’une lettre de de Charles Édouard qui le remerciait de ses services et le priait de continuer .. Parmi les aristocrates qui le reçurent (et ils furent nombreux) l’un d’entre eux semblait connaitre sa véritable identité, il s’agit du duc de Newcastle qui était alors en charge du secrétariat aux affaires étrangères. Pourtant le mystère autour de ses origines (que nous connaissons aujourd’hui) ne cesse de grandir. Le séjour londonien restera donc pour notre homme celui d’un séjour de création musicale intense car le comte se livre autant à l’improvisation qu’à la composition ce qui lui vaudra l’amitié (voir plus haut) du prince Lobkowitz qui ne devait pas non plus ignorer ses véritables origines liées au Habsbourg. Même Casanova consignera dans ses mémoires son art admirable de l’interprétation. De ce séjour St Germain publiera une dizaine de partitions ou de mélodies dont six sonates pour deux violons avec basse ainsi que de nombreux solos pour violon. Néanmoins inquiété et interrogé (mais sans preuve) il estime qu’il est temps pour lui de partir et de retourner sur ses terres natales en Allemagne, certainement dans le Hesse où sa mère avait des attaches. Il n’en reviendra qu’en 1758 et cette fois sous les lustres et les lambris des fastes de la cour royale de Louis XV.
La période française : à suivre dans la seconde partie 2/3
à paraitre mars 2020