Du message de la Croix d’Hendaye à celui de l’athanor de Winterhur
L’Adepte avait prévu de clore ses commentaires sur les opérations alchimiques par un traité de géophysique issu directement de ses considérations de physicien (et d’électricien) en rapport avec la genèse du Grand Œuvre. Au soir de sa vie ses préoccupations portaient sur le paléomagnétisme (qu’il cite dans les Demeures), au magnétisme terrestre ainsi qu’à la Vulcanologie suite à son voyage aux USA (parc de Yellowstone). Ce faisant, il ignorait que cette œuvre qui ne fut publiée que partiellement allait faire l’objet d’un travail bien plus considérable 50 ans après sous la plume de Immanuel Velikovsky, auteur de nombreux ouvrages dont Grands Bouleversements terrestres.
Avec son roman La Nuit des Temps, René Barjavel s’était ouvertement inspiré des Grands Bouleversements Terrestres donnant à l’un de ses personnages les traits d’Immanuel Velikovsky :
« Le géographe danois, exulte : il avait toujours soutenu la théorie si controversée d’un basculement du globe terrestre. Il en avait apporté des preuves multiples, qu’on lui réfutait une à une ».
René Barjavel avait mis en scène une équipe de scientifiques français en mission au Pôle Nord. En effectuant des carottages sous-glaciaires, ils découvrent deux êtres humains, un homme et une femme, gelés mais maintenus en vie par un système complexe dont la technologie leur échappe. Après une série d’aventures toutes plus réalistes les unes que les autres, un groupe de savants internationaux parvient à réveiller la femme, sorte de nouvelle Eve qui leur dessine la carte du monde où elle avait vécu. Stupéfaits, les scientifiques finissent par comprendre qu’entre-temps, la Terre s’était… retournée :
« Un cataclysme brutal a fait tourner la Terre sur un axe équatorial, bousculant les climats en quelques heures, peut-être en quelques minutes, brûlant ce qui était froid, glaçant ce qui était chaud, et submergeant les continents de masses énormes d’eaux océanes arrachées à leur inertie. (…) Les deux Amériques occupent l’écran. Mais le basculement du globe les a mises dans une position étrange. Elles se sont inclinées, celle du Nord vers le bas, celle du Sud vers le haut».
Depuis, les preuves de ce qu’il affirmait se sont accumulées : au cours des 80.000 dernières années, la Terre s’est renversée au moins à trois reprises. Et sur 600 millions d’années, les pôles ont changé de place plus de 200 fois !
Épilogue d’une aventure commencée il y a plus de 20 ans, ce dernier opus achève notre Odyssée auprès du Maitre. Il fut initié au grand amphithéâtre de la Sorbonne à l’occasion d’un hommage collectif au Maitre de Savignies, le fidèle et obédient disciple de Fulcanelli. Nous y avons rassemblé son message eschatologique (apocalyptique serait plus juste) qui complémente ses directives opératives disséminées dans ses deux ouvrages principaux : Le Mystère des Cathédrales et les Demeures Philosophales. Finis Gloriae Mundi devait être un ouvrage à part mais heureusement et par souci de faire survivre l’œuvre de l’Adepte Eugène Canseliet en a sauvegardé quelques chapitres qu’il à réparti ensuite dans les deux ouvrages cités : Le cavalier de Melle, L’obélisque de Dammartin et la Croix d’Hendaye. Le poêle de Winterthur échappait à cette recension et pourtant car sans doute – autant que les autres demeures – il contient lui aussi ce message apocalyptique avec l’avantage de pouvoir le dérouler en 18 carreaux de faïence. Nous en donnons le compte rendu dans notre ouvrage qui permet de compléter utilement les autres témoignages laissés à la postérité de l’étudiant. Note : il a été négligemment écrit ici ou là par des plumes irresponsables, que Le Finis Gloriae Mundi fut repris par l’Adepte mais il n’en est rien, car il fut repris par son fils à la mort de celui-ci, le même d’ailleurs en sa qualité de Commandant qui supervisa pendant la guerre la fameuse usine à gaz de Sarcelles et employa le très jeune Eugène Canseliet comme employé aux écritures comptables en raison de son excellente calligraphie. Un autre jeune employé qui avait fuit l’Alsace occupée fut également affecté sous ses ordre et avait pour nom Schwaller. (René Schwaller)
Les coraux de la mer du Nord
« Le Spitzberg (78° 56′ de latitude Nord), une possession norvégienne de l’océan Arctique est aussi distant d’Oslo que celle-ci l’est de Naples. Heer y identifia 136 espèces de plantes fossiles et les assigna à l’époque tertiaire. Parmi ces végétaux, il inventoria des pins, des sapins, des épicéas et des cyprès, ainsi que des ormes, des coudriers et des nénuphars.
L’extrémité Nord de l’île recèle une couche de charbon noir et brillant, épaisse de 8 à 10 mètres ; elle est recouverte de schiste noir et de grès incrusté de plantes fossiles terrestres. « Lorsqu’on pense que cette luxuriante végétation croissait à moins de 8° 15′ du pôle Nord, dans une région qui reste dans l’obscurité pendant la moitié de l’année et qui est aujourd’hui presque continuellement sous la neige et la glace, il est facile d’évaluer la difficulté du problème que pose aux géologues la répartition des climats ».
Pour constituer une couche de charbon de 10 mètres d’épaisseur, le Spitzberg devait avoir des grandes forêts. En admettant que, pour une raison quelconque, cet archipel ait joui d’une température comparable à celle de la Côte d’Azur, il est impossible qu’elles y aient poussé car à 1.500 km à l’intérieur du cercle polaire, la nuit règne 6 mois sans interruption, et le reste de l’année, le soleil se tient très bas au-dessus de l’horizon. Pourtant, on y a retrouvé non seulement des arbres fossiles et du charbon, mais aussi des coraux qui ne croissent qu’en eau tropicale ; la Méditerranée, même à la hauteur de l’Égypte ou du Maroc est trop froide pour eux… Or, ils ont prospéré le long des côtes du Spitzberg ! De nos jours, on peut y contempler leurs immenses colonies recouvertes de neige. Même en faisant remonter la formation de ces madrépores au passé le plus lointain, le problème de leur croissance n’est pas résolu.
A une certaine époque, les coraux vivaient tout le long des côtes de l’Amérique du Nord ( Alaska, Canada et Groenland ) – on les voit encore, pétrifiés. Plus tard, au tertiaire, les figuiers fleurissaient à l’intérieur du cercle arctique ; des forêts de séquoias, conifères géants de Californie, s’étalaient du détroit de Béring au Nord du Labrador. « Il est difficile d’imaginer les conditions climatiques qui ont permis à ces arbres de pousser si près du pôle, privés de soleil pendant plusieurs mois de l’année ».
On prétend qu’autrefois le climat était identique sur la totalité du globe et que la caractéristique « des périodes chaudes qui ont constitué la plus grande partie des temps géologiques était la faible différence de température entre les régions équatoriales et les régions polaires ». A cela, dans son livre Climate through the Ages, Brooks répond :
« Tant que l’axe de rotation reste à peu près dans sa position actuelle relativement au plan de l’orbite terrestre autour du Soleil, la limite extérieure de l’atmosphère dans les régions tropicales doit recevoir plus de chaleur solaire que les latitudes moyennes, et les latitudes moyennes plus que les régions polaires ; c’est une loi invariable… Il est très difficile de concevoir une cause susceptible d’élever la température de ces régions de 15°, ou davantage, tandis que celle des régions équatoriales resterait la même ».
L’Antarctique est plus grand que l’Europe, Russie occidentale comprise. Il n’y a pas d’arbres, aucun buisson, pas le moindre brin d’herbe ; on n’y a trouvé que très peu de moisissures. Les textes des explorateurs polaires n’y mentionnent pas d’autres animaux que de rares insectes extrême- ment dégénérés. Les manchots et les mouettes y viennent en traversant la mer. Ce continent, soumis à de fréquentes tempêtes d’une violence inouïe, est presque totalement recouvert de glace qui, en certains endroits, descend jusqu’à l’océan. Au cours de son expédition de 1907-1909, Shackleton a trouvé du bois fossile dans le grès d’une moraine par 85°5′ de latitude Sud. Il a également rencontré des blocs erratiques de granit sur les flancs du volcan Erebus. Puis il découvrit 7 veines de charbon, à 15° seulement du pôle ; elles varient entre 1 et 2 mètres d’épaisseur. Des morceaux de grès contenant du bois de conifères sont mêlés à cette houille119. Les terres de l’Antarctique, elles aussi, ont dû donner naissance jadis à de grandes forêts.
Le paléoclimatologue a choisi un problème aussi difficile à résoudre que celui de la quadrature du cercle ; il semble en effet que cette discipline se résume à un ensemble de questions non résolues et même insolubles. Sans un ou plusieurs changements notables du parcours orbital de notre planète ou de l’inclinaison de son axe – ou les deux conjugués – les conditions qui ont permis à des plantes tropicales de se développer dans les régions polaires n’auraient pas pu exister. Que l’incrédule essaie de cultiver du corail au pôle Nord ! »
Du bouleversement et extinction en masse : la preuve sibérienne
Alors que les tropiques (découverte des preuves par Louis Agassiz en 1895) étaient sous la glace, la Sibérie jouissait d’un climat tempéré, voir tropical capable avec ses immenses prairies d’assurer la subsistance des immenses troupeaux de Mammouths. En effet c’est dans l’étude des différentes théories de la glaciation que la théorie du Finis Gloriae Mundi trouve ses racines et on comprend aussi quelles étaient les raisons secrètes de l’Adepte pour gravir à cette époque les pentes du Mont Blanc (on trouvera le récit complet de cette extraordinaire odyssée dans le premier volume « Portrait d’un adepte du XX ème siècle ») : il n’y avait pas que l’actinomètre à expérimenter sur son sommet mais bien l’étude glaciologique du toit de l’Europe.
En 1837 Agassiz publia sa théorie Étude sur les Glaciers assez proche des conclusions reprises par l’Adepte :
« Le sol de l’Europe, orné naguère d’une végétation tropicale et habité par des troupes de grands éléphants, d’énormes hippopotames et de gigantesques carnassiers, s’est trouvé enseveli subitement sous un vaste manteau de glace recouvrant indifféremment les plaines, les lacs, les mers et les plateaux. Aux mouvements d’une puissante création succédèrent le silence et la mort. Les sources tarirent, les fleuves cessèrent de couler et les rayons du soleil, en se levant sur cette plage gelée ( si toutefois ils arrivaient jusqu’à elle), n’y étaient salués que par les sifflements des vents du Nord et par le tonnerre des crevasses qui s’ouvraient à la surface de ce vaste océan de glace. »
De son propre aveu, il considérait que le début et la fin de la glaciation résultaient d’événements catastrophiques, ne niant pas que les mammouths de Sibérie aient pu être congelés en un instant grâce au rapide envahissement du globe par la glace. Il admettait que des cataclysmes successifs se soient produits à l’échelle mondiale accompagnés d’une chute de température, et que les périodes glaciaires (car il y en avait eu plus d’une) se soient à chaque fois terminées par un regain d’activité du feu central (éruptions de l’intérieur ).
De toutes les notes du Finis Gloriae Mundi, il ne restait plus, pour les avoir oubliées, peut-être, entre les mains du disciple, que les notes et les dessins sur la croix cyclique d’Hendaye qui furent donc ajoutés à la deuxième édition, et les éditions successives, en fin d’ouvrage, du Mystère des cathédrales. Le chapitre sur la croix cyclique d’Hendaye est donc, en vérité avec les trois autres chapitres , Dammartin sur Tigeaux, l’Atlantide, le cavalier de Melle, le chapitre rescapé du disparu Finis Gloriae Mundi. Nous avons consigné cependant la table des matières de l’ouvrage non publié telle qu’elle fut recueillie précieusement par Jean Laplace avec quelques notes inédites. Ci-joint (archive privée) une photo de geyser reconstitué par l’Adepte au CNAM, celui-ci se passionnait pour la vulcanologie et la glaciologie, passion qu’il avait en commun avec le prince Bonaparte, Roland Napoléon Bonaparte descendant de Lucien Bonaparte. Roland Bonaparte fut président de la Société de géographie de 1910 à sa mort et, en 1907, membre de l’Académie des sciences. C’est à l’occasion de l’ascension du Mont Blanc qu’ils firent connaissance, le prince ayant financé son expédition scientifique. Pour information Antoine d’Abbadie, le Prince René Napoléon, les Lesseps et Fulcanelli se côtoyaient régulièrement dans le cadre de leurs activités : géographie, sismologie, paléomagnétisme ou vulcanologie. Eugène Canseliet a très bien donné la vison de ce milieu en citant l’Adepte en calèche assis à côté du Président du Conseil (l’équivalent de notre Président de la république) ou le croisant avenue Montaigne sortant de chez les Lesseps quand ce n’est pas avenue Iéna ou résidait le Prince. Ses laboratoires (voir le chapitre qu’il y consacre en s’en moquant dans « Le laboratoire légendaire » étaient le plus souvent moderne et nombreux : École Normale, CNAM ou cercle privé qu’il fréquentait …
à venir et à suivre dans notre ouvrage à paraitre…