Après guerre ils ne furent que trois grands penseurs à théoriser un nouveau paradigme pour l’humanité à venir : Martin Heidegger, C.G Jung et Teilhard de Chardin. Tous trois avaient conscience de la nécessité et de l’urgence de ce nouveau paradigme sans lequel l’humanité allait à sa perte. La question ontologique de Heidegger et sa réflexion sur l’essence de la technique (qui n’est rien de technique en soi) rejoint à sa façon celle de l’inconscient collectif du psychiatre suisse (son énergie libre et non locale) en cela relayé par la vision convergente et émergente du paléontologue définissant un point Omega , attracteur cosmique vers lequel nous projetons l’énergie créatrice de l’ensemble de la biosphère. L’ »OMergence » est en référence avec le point de convergence Oméga qui exprime l’essentiel de la pensée du père Jésuite et rappelle en même temps la syllabe sacrée OM (AUM) de l’hindouisme et du bouddhisme tibétain.
Que signifie l’émergence d’une harmonisation des esprits, fondée sur le respect des divergences et la liberté individuelle ?
Tout d’abord, il est possible que cette émergence de la conscience collective soit une étape totalement naturelle pour une civilisation appelée à devenir planétaire. Il existe un chemin initiatique universel bien marquée dans le développement individuel, et conduisant à l’harmonisation moi-Soi dans lequel se retrouvent pratiquement toutes les religions et toutes les cultures, à toutes les époques qui nous sont connues. Il prend bien sûr des noms et des formes un peu différentes, mais le pattern de base est clairement reconnaissable, de même que l’état de conscience final. Ce grand penseur que fut le père Pierre Teilhard de Chardin, anthropologue qui a concouru à la découverte de l‘Homme de Pékin, avait mis en lumière une évolution croissante de la conscience individuelle sur terre. Il s’agissait pour lui d’un processus constant (même s’il n’était pas uniforme) stimulant la prise de conscience dans le vivant. Et pour cette raison, il entrevoyait une conscience primitive jusque dans la matière et les formes de vie primitives, subissant une attraction irrésistible vers des formes de conscience plus hautes.
Il sentait que l’être humain était arrivé à un seuil, un plafond dans le développement de la conscience individuelle, et se demandait quelle allait être la teneur de la nouvelle voie d’évolution qui allait s’ouvrir pour l’humanité. Or il lui paraissait absolument certain que cette évolution de la conscience continuerait (comme elle l’avait toujours fait) à favoriser la plénitude de la conscience individualisée. Teilhard était aussi un visionnaire et dans son œuvre maîtresse, L’Énergie humaine, il mentionne avoir vécu des états de conscience transcendants. Il entrevit que cette nouvelle voie serait une nouvelle dimension de conscience collective, l’interpénétration des esprits créant une sorte de supra-conscience planétaire – qu’il nomma le Point Oméga. «Nous allons vers un état supérieur de conscience générale, liée à une synthèse ultérieure de nos consciences particulières », dit-il dans Le Phénomène spirituel (p. 128).
Mais dans cette supra-conscience collective, chaque individualité humaine – chaque Soi ou monade – serait encore plus pleinement « soi-même » tout en participant à la conscience planétaire. Pour lui, la conscience planétaire (ce qu’il nommait l’esprit de la Terre) n’avait fait, tout au long de l’évolution de la planète, que d’évoluer vers une plus grande conscience. Mais bientôt, avec l’interpénétration croissante des esprits humains, elle allait être transfigurée dans une toute nouvelle dimension de conscience – qui continuerait alors son évolution sans fin vers le Point Oméga, car pour Teilhard, ce Point Oméga n’était pas un état final mais un attracteur vers une plus grande conscience.
Teilhard écrivait Le Phénomène spirituel en 1937. En ce début du XXle siècle. En raison de sa démographie incontrôlée, notre évolution sur terre a dépassé un point de non-retour vers une catastrophe planétaire. Seul un saut qualitatif géant dans la conscience collective pourra dévier cette courbe fatidique : saut vers un état harmonisé de toutes les consciences terrestres, et prise de conscience abrupte que nous sommes des humains appartenant à la Terre – et responsables de la Terre –avant d’être de tel pays ou de telle religion. Ce saut est non seulement inéluctable si nous voulons survivre mais il va devoir se passer dans un temps humain très rapide. Nous sommes là dans un ordre de temps d’un siècle seulement pour avoir encore la possibilité de redresser ou limiter les effondrements en chaîne des systèmes écologiques.
Il nous faut donc créer et construire une véritable conscience collective humaine en harmonie avec et dans la conscience globale de Gaïa. Ce doit être, pour chacun d’entre nous, un effort constant pour s’harmoniser avec notre environnement humain et naturel car c’est bien dans l’esprit de chaque individu que ce saut peut être amorcé. Les esprits individuels vont déclencher en eux-mêmes un saut géant dans leur état de conscience, qui va se diffuser et se répercuter de proche en proche en tissant un gigantesque réseau de consciences connectées. Ceci jusqu’à un seuil, où, soudain, la conscience planétaire entière sera embrasée et opérera ce fameux saut collectif.
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