Introduction : dans le cadre de notre travail entrepris il y a plus de 30 ans sur l’Adepte, nous évoquons ici au travers d’une série d’articles les raisons de sa connaissance de la langue des oiseaux, terme qu’il contribua à populariser par ses écrits, autrement nommé cabale solaire dont l’épicentre à son époque se situait au cabaret du Chat Noir à Montmartre (Voir le Gilpin solaire). Ci-dessus anges surmontant le « H » de l’oratoire du monastère de Cimiez.
On se souvient du Sphinx dessiné par Julien Champagne accompagné du corbeau noir pour orner le frontispice du Mystère des Cathédrales, deux symboles de cette confrérie. La Société Angélique, encore appelée » le Brouillard « , est une société secrète littéraire et artistique, négligée par les historiens parce qu’elle n’a pas joué, apparemment, de rôle politique. Elle fut fondée par l’imprimeur lyonnais Gryphe au XVIe siècle. Celui-ci, de son vrai nom Sébastien Greif, était originaire de Reutlingen en Wurtemberg et s’était installé à Lyon en 1522. Il avait complété l’adoption de son pseudonyme par l’emblème d’un griffon, qu’il aurait emprunté au nom grec Néphès -le Brouillard – qui désignait le Principe Universel, puisque : » C’était la nue, le nuage, qu’embrassait Ixion et que les Grecs nommaient Gryphe, l’embrouillée, avec une tête de boeuf pour hiéroglyphe « .
Rabelais, qui affirma sa qualité de maçon accepté à plusieurs reprises , assimilait de son côté dans le Cinquième Livre (Chapitre XI) le griffon au sphinx. Guillaume Postel et Antoine Fumée firent explicitement référence à la Société Angélique en accusant Rabelais, leur contemporain, d’appartenir à une société secrète dont Postel soulignait, en 1452, le caractère pernicieux, « si même elle ne nie pas Dieu directement ou indirectement comme ils disent et ne s’efforce pas de le chasser de son ciel » . En effet, dans Pantagruel (livre V, chapitre XVIII) Rabelais rend hommage au « Viet d’aze ( … ) nostre unique Elixo [élixir] ». Or le Viet d’aze, en provençal, n’est autre que le visage d’âne. Et l’âne rouge était le symbole du dieu égyptien Seth, meurtrier de son frère Osiris.
Selon Grasset d’Orcet , autour de l’imprimeur allemand Gryphe s’était ainsi groupée une pléiade de savants et de la littérateurs qui s’intitulait la Société Angélique. Aggelos signifie le messager, le porteur de nouvelles ; et la Société Angélique était une sorte d’agence de correspondance occulte utilisant le codage par le lanternois, le patelinage, le grimoire. Bref une cabale phonétique particulièrement ardue à décrypter pour qui n’a pas été initié à cette » langue des oiseaux « . La « bible » de la Société Angélique était le Songe de Poliphile, achevé en 1467 par Francesco Colonna, un dominicain né à Venise en 1433, qui ne fut très certainement que le porteparole d’un cénacle occulte. Le Songe fut édité dans la cité des Doges en 1499 par le célèbre Alde Manucce dit l’Ancien.
La société Angélique : sous ce nom, se cache donc l’une des organisations secrètes les plus puissantes du XVIIème, très liée avec les Jésuites elle invente une méthode cryptographique qui ne sera découvert que par l’écrivain et journaliste Grasset d’Orcet au XIXème siècle. Fulcanelli la connaissait comme il connaissait l’oeuvre et les écrits de Grasset d’Orcet. Parmi ses membres éminents on dénombre Saint Vincent Depaul et Giovanni Domenico Cassini, le surintendant Nicolas Fouquet, les deux premiers laisseront à la postérité un legs testamentaire, l’obélisque d’Hendaye pour le premier (avec le rappel des « A ») et le vaste programme du calcul du méridien de Paris pour le second. Tous deux auront un héritier Fulcanelli lui même, qui ne cessera de leur rendre hommage, pour le premier par sa description de l’obélisque et pour le second en présidant la commission des poids et mesures qui eut pour objet de ré-étalonner le Maitre (Mètre) Etalon et qui fit appel à lui pour cette délicate opération relatée dans les Demeures Philosophales… et dont nous avons par devers nous les minutes sur les opérations qui lui ont permis de refondre le platine qui servit à ce fameux mètre avant qu’il ne soit pas détrôné par perfidie par le mètre de Greenwich.
Le vocable d’Angélique vient dans un premier temps de l’usage d’un Ange placé dans la lettre A comme signe de reconnaissance. Les premiers angéliques sont issus des confréries de lettres, des clercs et principalement (mais pas uniquement) des milieux liés à la diffusion du livre, donc typographes, imprimeurs, colporteurs, scribouilleurs etc … Le tout résumé dans un art d’angler que Fulcanelli fera également connaitre au travers de ses écrits et pour cause car le principal foyer de diffusion est lyonnais et donc à deux pas de chez lui.
Selon Grasset, Rabelais semble être le premier à avoir appliqué à la littérature les règles de l’aNGLe, que l’on peut aussi bien lire LaNGue L. Il appartenait, comme Étienne Dolet ou Bonaventure Despérier, à la Société angélique. fondée par l’imprimeur Gryphe. Les membres de ce petit cénacle littéraire de savants et d’artistes s’étaient placés sous le patronage de saint Gilles, et avaient pris pour cimier une tête d’ange. Selon Grasset, les mots IL GèLe auraient sen-i à indiquer dans cette société la présence d’un indiscret. Grasset d’Orvet précise aGgeLos signifie réellement un messager, un porteur de nouvelles; la société angélique de Gryphe était juste aussi angélique qu’une agence de presse aujourd’hui comme Média Part ! On la nommerait aujourd’hui une agence de correspondance.
Paul Naudon historien de la Franc Maçonnerie, suppose l’existence d’un cénacle, qu’il nomme AGLA. Les règles du grimoire identifient aGLa, aGeLos et GiLles, mais aussi aiGLc. Or, dans un autre article, Grasset précise que Aggelos est l’esprit en grec. C’est aussi le sens de l’aiGLe de saint Jean, figuré sur les lutrins des églises. Mais GL représente les GouLiards ou GauLts. Grasset suppose que ces Gouliards tiraient leur nom de la langue dans laquelle ils écrivaient leurs hiéroglyphes : le GauLois ou la langue populaire. AGLA est bien connu des imprimeurs car ce sont les 4 lettres aux extrémités du tableau de casse placé sous ses yeux…
AGLA
La société secrète AGLA fut créée en 1509 par Cornélius AGRIPPA dans la rue Mercière de Lyon qui de nos jours est la rue des restaurant mais à la Renaissance était le quartier des imprimeurs qui avaient accouru en nombre dans cette ville de foires et de savoir. Mais les conditions de travail trés dures de cette profession engendrèrent des grèves et des révoltes. Si en 1500 on comptait 50 imprimeurs et plus de 100 en 1550 ce qui faisait de Lyon la 3 eme ville d’Europe pour l’impression et la diffusion des idées, à la fin du siècle la profession avait pratiquement disparu.
Dans cette ville de Lyon, on trouvait à la même époque François Rabelais médecin à l’Hotel Dieu de Lyon et membre de l’AGLA et le roi François 1er qui qui ayant fait de cette ville sa base arrière pour ses conquètes italiennes, pensa faire de Lyon la capitale de la France. Mais la mort subite et suspecte du Dauphin le poussa à quitter rapidement cette ville où il avait été initié à l’AGLA.
Ce mot était, pour les cabalistes, un sigle parfait ; il se compose des initiales des mots Atah gabor leslam, Adonaï, tu es puissant éternellement, Seigneur. L’Agla était une société ésotérique groupant les apprentis, compagnons et maitres de la corporation du livre. Le « glyphe » collectif de cette vaste association était le chiffre 4. Il figurait, accompagné de fioritures ou d’adjonctions distinctives, dans la marque particulière de chacun des maitres de cette confrérie. Fréquemment, il surmonte un tracé secondaire indiquant une seconde association intérieure à laquelle appartenait le signataire. C’est ainsi que l’hexagramme, ou sceau de Salomon, le monogramme de Marie, désigneraient une association s’occupant d’alchimie et d’hermétisme, alors que le coeur concernerait un autre rameau étudiant plus spécialement la Kabbale.