Oswald Wirth et Jules Romains : les hommes de bonne volonté


jules_romainsEn 1932, Wirth publie le Rituel de l’Adepte. Ce livre couronne la trilogie initiatique constituée par les trois livres spécifiques des grades : Apprenti, Compagnon, Maî­tre. Définissant son sujet, l’auteur écrit qu’il a voulu mettre « l’initiable sur la voie d’un programme auquel il lui ap­partient de se conformer selon l’esprit. S’il est doué de perspicacité et de persévérance, et d’un fervent désir de s’initier, la lumière se fera graduellement dans son sanc­tuaire intérieur ».

Lorsque dans la fresque de la vie française au XXe siècle qu’il appellera Les Hommes de bonne volonté, Jules Ro­mains veut parler de la Franc-Maçonnerie, il intitule Re­cherche d’une Eglise le tome consacré à ce travail, le sep­tième de la série. Il a vécu sur les notions alors familières à l’opinion française. La Maçonnerie vit alors aux lendemains de 1914, tout imprégnés des souvenirs qui ont précédé la déclaration de guerre que l’armistice et ce qui l’a suivi n’ont que peu rajeunis, et que le cartel poli­tique de 1924 a même plutôt accentués.

Jules Romains avait un grand scrupule de rigoureuse exactitude et s’évertuait à pénétrer les multiples détails de toute affaire qu’il voulait traiter. Avant de tracer son récit, il avait donc tout lu et rencontré beaucoup de maçons ou d’anciens maçons. Des fanatiques et des déçus, des dolents béats et des démissionnaires dénigrant une institution qui les avait laissé indifférents ou insatisfaits, des partisans sommaires aussi. Rapprochés de ce qu’il savait, les éléments de son enquête l’avaient conduit, de degré en degré, à pressentir qu’il y avait dans le corps maçonnique, un courant mystique et spiritualiste sous-jacent dont les tenants avaient, par la qualité de leur pensée, leur talent et la dignité de leur vie, une influence l’emportant de beaucoup sur leur nombre relativement faible, donc bien plus importante que le pensaient les igno­rants. Et puis ses lectures sur les origines de l’Ordre ne s’accordaient guère avec la réalité organique de ce dernier en 1934. Au cours de ses recherches, on lui signala Wirth.

C’est de la rencontre de Romains avec ce dernier que naquit le personnage de Lengnau. Aux caricatures malveil­lantes qu’avait tracées Arbansaux, nom prêté à un autre témoin appartenant à la Maçonnerie déviée, Wirth, sous le pseudonyme de Lengnau, oppose un tableau de la pen­sée maçonnique qui ne convainc pas son interlocuteur Jerphanion — sous ce nom d’un normalien agnostique —, Romains se met lui-même en scène. Mais tout de même l’exposé, sans le convaincre, le saisit. Le comportement de Lengnau, sa foi, sa sincérité profonde, l’ampleur et l’élé­vation des vues qu’il a développées, suivant les grands thèmes de la pensée wirthienne, le laissent impressionné. Le pseudo-néophyte Jerphanion restera hors du Temple. L’homme de lettres demeurera plein de respect pour cet hôte chez lequel il a cru déceler la flamme, la grandeur, la beauté morale de ceux qui, au temps de l’érémitisme, furent les conservateurs des lumières de l’humanité. La démarche de Jules Romains était passée inaperçue.

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à suivre dans le cahier


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