La figure laissée en héritage se présente à nous tel un Janus Bifrons et nous auront aussi à en méditer toutes les conséquences. Fulcanelli nous a ouvert au travers de sa conception des nouvelles « Demeure Philosophale » bien des portes et sa personne se rattache sans aucun doute à ce dieu tutélaire des romains. Une étude quine s’attacherait qu’à démontrer son identité manquerait ses buts si elle ne proposait dans le même temps une lecture continue de cet étrange entrelacement voulu par un seul homme qui à sa façon a transcendé les deux autres. A cela il y a une explication assez simple : il ne fut jamais complètement aucun des deux, ni totalement le savant, ni totalement l’adepte et nous nous en expliquons également.
Il convient en premier de comprendre ce mécanisme à double clé pour aborder la psychologie (et du même coup la biographie) de cet étrange destin. Il figure sûrement parmi les plus grands et les plus anciens dieux du Panthéon romain. Il serait même supérieur à Jupiter le dieu suprême.
Son histoire commence lorsqu’il s’est établi dans le Latium, après avoir accosté l’Italie avec sa flotte. Il recueillit Saturne, le dieu des Semailles et des Grains, chassé des cieux, alors qu’il régnait sur le Latium. En remerciement de son hospitalité, celui-ci offrit à Janus le don de la « double science ». Ce pouvoir permettait de maîtriser la science du passé et celle de l’avenir, d’où la représentation de Janus avec deux visages orientés dans des sens opposés.
Janus eut aussi un fils, Tiberinus, qui se noya dans le Tibre et donna son nom à ce dernier.
Viennent alors de nombreuses autres attributions telles que celle de gardien des portes (Janus Bifrons), ce qui justifie encore son double visage. Il est également le dieu du Commencement (Januarius peut se traduire par « janvier » ou « mois de Janus ») et des Quatre Saisons (Sa tête est alors représentée non pas avec deux visages mais avec quatre).
Les Romains ouvraient les portes de son temple en temps de guerre, pour montrer que le dieu était parti combattre, puis ils les refermaient durant la paix, ce qui symbolisait sa réintégration dans son sanctuaire ; il pouvait ainsi veiller sur la ville.
De par ses attributions, Janus était le dieu principal d’une cité qu’il pouvait surveiller dans tous les sens, sans que rien ne lui échappe.Chez les Saliens, prêtres qui tirent leur nom du verbe salire (« danser »), il est même considéré comme le « dieu des dieux » dans leur hymne.
Il était également le premier nommé dans toutes les listes de dieux et dans toutes les prières, avant même Jupiter.
Son prêtre portait le nom révélateur de rex sacrorum (« roi des choses sacrées ») et son temple à Rome était assez petit et clôturé (sauf en temps de guerre, bien sûr), en bronze. Il se situait sur le forum et portait le nom de Janus Geminus, ou « double Janus ». Un passage voûté traversait le sanctuaire à l’est et à l’ouest.
Ovide a raconté que Janus s’appelait Chaos à l’époque où l’air, le feu, l’eau et la terre ne formaient qu’une masse. Quand les éléments se séparèrent, Chaos prit sa forme de Janus; ses deux visages représentent la confusion de son premier état. D’autres légendes font de Janus un roi de l’âge d’or du Latium. Il y aurait accueilli Saturne chassé du ciel par Jupiter.
L’origine de son nom est Incertaine. Cicéron la cherche dans le verbe ire. D’autres préfèrent le radical div (dividere) et supposent que la première forme du nom était Divanus. Une troisième hypothèse envisage une forme Ja, na, parfois employée pour Diana, dont la racine dius ou dium évoquerait l’idée du ciel lumineux.
Cette dernière étymologie s’accorde avec la constatation que Janus fut à l’origine un dieu solaire. Comme on le voit, ses attributions sont nombreuses, importantes, et dérivent les unes des autres.
Le culte de Janus fut établi soit par Romulus, soit par Numa, et resta toujours populaire chez les Romains. Janus figurait en tête dans les cérémonies religieuses, et, en sa qualité de père des dieux, passait le premier dans leur énumération, et même avant Jupiter. On l’honorait au premier jour de chaque mois, et le premier mois de l’année (Januarius) portait son nom.
Étant le dieu des portes, il est par le fait même celui des départs et des retours, et par extension celui de toutes les voies de communication. Sous le nom de Portunus, il est considéré comme le dieu des ports; et comme on voyage aussi bien par eau que par terre, il passe pour avoir inventé la navigation.
Janus était aussi le dieu des commencements, Dieu solaire, il présidait au lever du jour (Matutinus Pater). On ne tarda pas à le considérer comme le promoteur de toute initiative et, d’une façon générale, il fut placé à la tête de toutes les entreprises humaines. De là vient que les Romains lui attribuèrent un rôle essentiel dans la création du monde. Il passa pour le dieu des dieux, Janus Pater.
Le Dieu des portes et des passages
« …tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes. »
Deutéronome 6 :4
Janus (en latin, « porte », ou «barbacane») présente ce trait particulier d’être un dieu essentiellement italique et plus précisément romain. Il ne figure dans aucune autre mythologie et pourtant l’aspect symbolique qu’il recouvre ne trouve pas uniquement ses sources dans la culture du latium.
Janus est d’abord le dieu de toutes les portes : des portes publiques ( jani ), sous lesquelles passaient les routes, et des portes privées. Il a donc pour insignes la clé qui ouvre et ferme la porte, et la baguette (virga) dont les portiers se servent pour écarter tout ce qui ne doit pas franchir le seuil. Ses deux visages (Janus bifrons) lui permettent de surveiller le dehors et l’intérieur du logis, comme l’accès et la sortie des portes publiques.
Sur le point de ses attributs particuliers, René Guenon fait état d’un curieux document représentant expressément le Christ sous les traits de Janus. Il s’agit d’un cartouche peint sur une page détachée d’un livre manuscrit d’église, datant du xve siècle et trouvée à Luchon, le médaillon représente un buste de Janus Bifrons, avec un visage masculin et un visage féminin, ainsi que cela se voit assez fréquemment; il porte une couronne sur la tête, et tient d’une main un sceptre et de l’autre une clef.
Sur les monuments romains Janus se montre, comme sur ce cartouche la couronne en tête et le sceptre en la main droite, parce qu’il est roi; il tient, de l’autre main une clef qui ouvre et ferme les époques; c’est pourquoi, par extension d’idée, les Romains lui consacraient les portes des maisons et des villes. Dans la quatrième des grandes antiennes d’avant Noël, la liturgie sacrée acclame ainsi Jésus : « O Clavis David, et Sceptrum dornus lsrae ».
L’auteur des cahiers Fulcanelli
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